( Dans ce communiqué du 17 mars 2013, le Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire du Québec (RQIIAC) dénonce des politiques récentes fédérales et québécoises et offre son appui au Collectif pour un Québec sans pauvreté.)

Dans quelques jours ce sera le printemps, un printemps noir qui n'augure rien de bon.  En effet, les mesures récemment annoncées tant par le gouvernent fédéral que par le gouvernement du Québec, toucheront à maints égards et de plein fouet les populations les plus démunies et les plus vulnérables du Québec.  Qu'il s'agisse des coupures à l'assuranceemploi, des restrictions touchant certaines catégories de bénéficiaires de l'aide sociale ou plus récemment des «réaménagements budgétaires» de 3,5 % au réseau des CPE, ce sont toutes là des décisions indignes d'une société riche comme la nôtre.  Qui sera alors surpris d'apprendre que les inégalités sociales et de santé au Québec, loin de se s'amenuiser, continuent à s'accentuer, année après année ?

Certains auront tendance à vouloir « comptabiliser » l'impact de chacune de ces mesures pour déterminer quelle est la plus odieuse.  C'est là un faux débat, un exercice vain et futile. Une chose est certaine: les personnes seules, les familles et les personnes les plus vulnérables de notre société, notamment les enfants, feront les frais de ces choix éminemment politiques.

Comment un gouvernement peut-il faire la sourde oreille à tant d'études réalisées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et portées par son propre système de santé publique qui lui rappelle, depuis des décennies, que la pauvreté et les inégalités sociales sont les principaux déterminants de la santé ?  Asthme, retards de développement et de croissance, troubles du comportement ou mentaux, infections respiratoires, surpoids... ne sont là que quelques-unes des conséquences sur la santé, effets collatéraux (!), associés à la pauvreté chez les enfants qui, plus est, se répercute à l'âge adulte, avec une plus grande propension chez ces derniers à souffrir de diverses maladies chroniques, problèmes cardiovasculaire et autres.

Devant ces faits incontestables, toute politique gouvernementale québécoise ne devrait-elle pas avoir pour trame de fond la lutte à la pauvreté ? Il est vrai que la pauvreté chez les enfants a quelque peu régressé ces dernières années, entre autres grâce aux garderies à sept dollars et aux prestations de soutien aux enfants. Pourquoi alors faire marche arrière avec des mesures susceptibles d'aggraver les inégalités socio-économiques et de créer des situations qui, loin d'éradiquer ou de réduire la pauvreté, ne feront que l'accentuer chez ceux et celles qui la vivent au quotidien ?  De tels choix ne peuvent qu'ébrécher sérieusement le filet social québécois déjà attaqué de toute part.

En cette Semaine nationale de l'organisation communautaire en CSSS (SNOC), le Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire du Québec (RQIIAC) tient à joindre sa voix à celles des organismes et des associations dont le Collectif pour un Québec sans pauvreté qui, en grand nombre ces dernières semaines, ont dénoncé ces coupures annoncées aux effets dévastateurs.  Car elles auront pour résultat pervers de fragiliser davantage des milliers de personnes qui ont peine à se nourrir convenablement, souvent aux prises avec des problèmes de santé, soumises à un stress chronique et victimes de préjugés.  Il nous apparaît que toute mesure ne visant pas à établir un revenu permettant de combler les besoins de base des prestataires de l'aide sociale (élément combien déterminant dans une prise de contrôle sur sa vie!) ne fait qu'éloigner ces derniers d'une intégration citoyenne riche, active et participative, d'un avenir plus prometteur.  Force nous est de constater que les choix qui sont faits par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale ne vont pas en ce sens.

Présents partout au Québec dans les communautés souvent les plus vulnérables, les quelque 400 organisateurs et organisatrices communautaires en CSSS interviennent régulièrement auprès des personnes les plus démunies, accompagnant et soutenant maintes démarches communautaires axées sur la mise en place de solutions collectives nées de et avec la participation des personnes et des communautés concernées.  Le pouvoir d'agir et l'autonomie des personnes sont pour nous des vecteurs primordiaux de développement social et sont étroitement liées aux valeurs qui sont nôtres: solidarité, autonomie, respect, démocratie et justice sociale.

Refuser de prendre en compte les contraintes, obstacles et défis intrinsèquement liés à la pauvreté et ce, dans le respect des personnes, nous questionne profondément et démontre une méconnaissance inquiétante du vécu même de ces personnes dont la dignité est, jour après jour, ébranlée, grugée.  Le choix gouvernemental de restreindre et de réduire les sommes allouées pour certains bénéficiaires de l'aide sociale constitue donc un pas en arrière qui nous éloigne une fois de plus d'un objectif commun qui devrait être de faciliter pour tous et toutes l'accès à une citoyenneté à part entière.

En ce dixième anniversaire de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, nous vous demandons donc de reconsidérer cette orientation gouvernementale et de travailler de concert avec les milieux concernés pour faire un pas collectif dans ce long et difficile parcours vers un Québec sans pauvreté. 

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