Lettre ouverte du Comité de coordination du Réseau du Forum social de Québec Chaudière-Appalaches (27 juin 2005)

Publiée dans le journal Le Soleil (2 juillet 2005)
Nous ne voulons pas nous retrouver à la merci des assureurs privés....

Monsieur Jean Charest, premier ministre du Gouvernement du Québec,
Monsieur Philippe Couillard, ministre de la Santé et des Services sociaux,

Nous avons pris connaissance des impacts du jugement de la Cour suprême du Canada dans la cause de monsieur George Zeliotis, appuyée par le Dr Jacques Chaoulli, rendu le 9 juin dernier. Comme beaucoup d’autres au Québec, nous pensons qu’il y a tout lieu de croire que ce jugement ouvre grande la porte à une augmentation inacceptable de la présence du secteur privé dans notre système de santé. Nous voulons donc vous exprimer notre plus grande inquiétude et vous enjoindre à prendre les mesures qui s’imposent pour protéger notre système public de santé.

Sous prétexte de problèmes bien réels, mais qu’il faut placer dans une juste perspective, quatre juges de la Cour suprême ont décidé d’interpréter la Charte québécoise des droits et libertés de telle sorte que les riches pourraient bénéficier de soins de santé qui ne seraient finalement pas accessibles pour la majorité des Québécoises et des Québécois. À partir de là, les juges majoritaires, ont déclaré invalides des articles de la Loi sur l’assurance-maladie du Québec et de la Loi sur l’assurance-hospitalisation.

Le gouvernement du Québec a l’obligation de protéger notre système de santé public ainsi que les dispositions de la Charte des droits et libertés. Pour assurer l’accessibilité et l’universalité des soins de santé, le gouvernement du Québec a la responsabilité de prendre toutes les dispositions possibles. Deux moyens, notamment, s’offrent à vous : le recours à la clause dérogatoire et un réinvestissement dans le système de santé.

Il est essentiel d’empêcher complètement l’application des effets de ce jugement. C’est pourquoi nous vous demandons d’utiliser la clause dérogatoire, prévue à la Charte québécoise des droits et libertés, afin d’annuler les effets de la décision de la Cour suprême. Nous ne voulons pas nous retrouver à la merci des assureurs privés qui verront, par la situation créée par quatre juges, une nouvelle source de profits au détriment du droit fondamental de toutes et tous aux soins de santé indépendamment de leur capacité de payer.

Depuis plusieurs années, nous constatons que le budget de la santé du Québec se retrouve au dernier rang des provinces canadiennes. Il est donc urgent de corriger cette situation inacceptable en prévoyant tout de suite une augmentation substantielle des argents disponibles pour que les principes d’accessibilité et d’universalité soient pleinement mis en œuvre. Nous avons la conviction que c’est le meilleur moyen de mettre la société québécoise à l’abri d’une détérioration du système de santé et de l’apparition d’un système de santé à deux vitesses.

Nous comptons donc sur vous, monsieur le premier ministre du Québec et monsieur le ministre de la Santé, pour que les actions qui s’imposent soient prises de toute urgence. C’est votre responsabilité en tant qu’élus. Le gouvernement doit, sans hésitation, utiliser les moyens que l’État met à sa disposition pour protéger le système de santé public contre les risques de privatisation que fait courir à la société québécoise le jugement de la Cour suprême du Canada.

Nous vous remercions de l’attention que vous porterez à la présente et nous vous prions d’accepter nos salutations distinguées.

Le Comité de coordination
du Réseau du Forum social de Québec et Chaudière-Appalaches

Bernadette Dubuc
Mathieu Gagné
Michaël Lessard
Michel Leclerc
Monique Voisine
Nancy Gagnon
Yves Fortin

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